• CHIKOU - Chapitre X


    2ème partie - 5

    - Qui est Joss ? demanda Marx sur le chemin du retour.

    - Mon meilleur copain ! C’est lui que j’ai connu en premier quand j’étais petit. C’est lui aussi qui m’a conduit en ville. Tu viendras avec moi quand je retournerai là bas ?

    - Peut être…Je ne sais pas encore... J’avoue que Zara est une curieuse souris sympathique et que les amis dont tu m’as parlé sont curieux, eux aussi. En fait, tous ceux qui gravitent autour de toi sont de curieux personnages. J’ai bien envie de les voir d’un peu plus prés. Et puis, j’aimerai aussi revoir Mélika. Alors, oui, peut être…

    - Qu’as tu pensé de Zara ? J’ai vu que tu écoutais attentivement. Tu m’as paru très calme. Pourtant, la présence des souris, d’habitude,  ne nous laisse pas indifférents….

    - Oh ! Moi, je ne m’excite plus du tout pour ça. Les souris, c’est bon pour les jeunes chats qui courent après les bouts de ficelle. Ce qu’a dit Zara est intéressant par contre. Comme je te l’ai dit, ce n’est pas une souris ordinaire. En fait j’ai un peu de mal à organiser mes pensées. Je suis troublé. Je dois réfléchir. Depuis que j’ai rencontré le papa de Mélika, j’ai commencé à revoir mes attitudes passées et ça continue... Avant, je ne me serais pas arrêté à écouter les racontars d’une souris. Soit je l’aurai mangée si j’avais eu faim, soit je l’aurai dédaignée si j’avais eu le ventre plein. Mais dans aucune de ces deux hypothèses, elle n’aurait eu le temps de me parler. Enfin, je dois reconnaître que sans elle et son réseau, nous serions morts à l’heure qu’il est et cela donne à réfléchir.

    En arrivant à leur refuge, ils trouvèrent une bonne gamelle de poisson tiède devant la porte, qu’ils s’empressèrent de déguster.

    Au cours des semaines suivantes, Marx promena Chikou dans le périmètre des collines et des bois qui entouraient la maison. Il lui apprit à repérer les piéges placés par les humains pour attraper les renards. Il lui expliqua la différence entre les mulots et les souris.

    - Les mulots sont des souris des champs. Comme  elles peuvent s’introduire dans les maisons pour chercher de la nourriture, les humains ne font pas la différence avec les souris... Regarde ! Tu vois là ? Ce sont des crottes de mulots…

    - Tu crois que les mulots font partie de la bande à Zara ? Je ne vois pas moi non plus de différence entre une souris et un mulot...

    - J’en sais rien…De toute façon, ici, pas besoin de chasser puisque nous sommes bien nourris. Donc…

    A la fin de l’été, Chikou, complètement rétabli, dit à son ami :

    - Il va falloir que je parte Marx. J’ai envie de revoir mes compagnons de la zone. Ils me manquent…Tu viens avec moi ?<o:p></o:p>

    - Je pense que je vais t’accompagner. Mais ce n’est pas le moment de partir. Dans quelques jours, les hommes –chasseurs font revenir…

    - Les hommes - chasseurs ?

    - Oui, ici, il y a beaucoup d’humains qui chassent. Ils sont facilement reconnaissables car ils portent une sorte de long bâton qui crache du feu et ils sont accompagnés d’un ou de plusieurs chiens. Ils se promènent partout et ils tirent sur tout ce qui bouge, essentiellement les lapins et les oiseaux. Mais ils confondent souvent les chats et les lapins. C’est comme ça que beaucoup de nos frères sont tués. Il en meurt beaucoup pendant la période d’ouverture de la chasse. Avant que nous arrivions dans cette maison, ma mère et moi, nous sommes restés pas mal de temps dans la campagne, nous abritant dans les terriers de lapins ou sous les arbres morts. Un jour, alors que je poursuivais un lapin pour nous nourrir, j’ai entendu une détonation, c’est comme un coup de tonnerre, et le lapin que je poursuivais est tombé devant moi, raide mort. Heureusement, j’étais encore assez loin de lui. Je me suis arrêté net et j’ai entendu aussitôt après, l’aboiement d’un chien. J’ai fait volte face et je me suis tapi dans un fourré. J’ai vu arriver le chien à toute allure. Il s’est emparé du cadavre du lapin. L’homme l’a rejoint, il l’a caressé, il a pris le lapin et il l’a mis dans un sac, derrière son dos. Je n’ai pas bougé jusqu’à ce qu’ils disparaissent tous les deux mais j’ai compris que je l’avais échappé belle…Depuis, j’évite d’aller dans la campagne pendant l’automne. D’ailleurs, d’ici, quand la chasse sera ouverte, tu entendras les coups de fusils. Ça fait beaucoup de bruit et c’est très reconnaissable. Ils sont nombreux à chasser, ça pétarade dans tous les coins.

    - Décidément, les humains sont dangereux ! ajouta Chikou.

    - Oui ! Ils sont surtout imprévisibles ! Le problème avec eux, c’est qu’ils pensent que tout leur appartient. Ils estiment que le monde qui les entoure est là pour satisfaire leurs besoins et qu’ils peuvent en user comme bon leur semble, sans se soucier de rien d’autre que de leur plaisir. Donc méfiance ! Mais il y existe aussi des hommes qui sont très différents comme le monsieur chez qui nous habitons. Lui, il respecte la nature. Il ne chasse pas, il ne détruit pas systématiquement ce qui l’entoure. C’est ce que je te disais la dernière fois que nous en avons parlé. Rien n’est simple !

    - Tu penses que c’est pareil chez les chats ? Ou les souris ? Ou les autres espèces ?

    - Maintenant, oui ! Dans mon existence, j’ai rencontré pas mal de chats qui ne pensaient qu’à défier les autres. Pour montrer qu’ils étaient les plus forts, pour le prestige, la suprématie... J’étais comme eux, donc, je ne les blâme pas. Mais aujourd’hui, j’ai de plus en plus tendance à penser que la hiérarchie n’est pas une question de force physique. En ce qui me concerne en tout cas, je ne cherche plus l’affrontement pour m’imposer. Le défi, si défi il y a, ne viendra plus de moi. Si on me cherche, on me trouve, mais sinon, je passe mon chemin…. Repense aussi à ce que disait Zara à propos de ses congénères. Frivoles, insouciantes, individualistes, elles sont, mais quand il s’est agi de faire bloc pour te retrouver, elles se sont unies. Et Zara, elle-même, est bien la preuve que toutes les souris ne sont pas dénuées de réflexion. Encore une fois, rien n’est simple….

    Ils s’assoupirent. Chikou réfléchissait. Thoustra, Sam, Joss, Mélika, Zara, Manouche et maintenant Marx, il avait beaucoup appris en les écoutant. Oui, rien n’était simple…mais tellement intéressant…derrière ses paupières mi-closes, il observait son ami, couché prés de lui, qui se reposait. Les moustaches courtes, limées par la vie sauvage qu’il avait dû mener, cette cicatrice au dessus du nez, cachée en partie par les poils, et des yeux expressifs qui avaient perdu de leur dureté, un corps massif qui abritait des muscles puissants. Tel était Marx, son nouvel ami…

    Ils demeurèrent donc encore trois mois chez cet homme qui les nourrissait si bien. Ils étaient devenus difficiles quant à leur alimentation. Les deux chats ne mangeaient que ce qui était frais et tendre, refusant d’absorber les restes du repas de la veille. L’homme se moquait gentiment d’eux.

    - Mes gaillards ! Vous êtes devenus difficiles !… Regardez vous ! Vous voila gras et paresseux ! Ah, les chats ! Vous aimez le confort hein ? Vous avez raison, profitez en ! Vous êtes magnifiques !

    Caressant leur fourrure, il admirait les poils qui brillaient au soleil. Sourire aux lèvres, l’air attendri, l’homme n’était pas avare de caresses, à la satisfaction ronronnante des deux compères qui le remerciait à leur façon.

    - Il faut partir Marx dit un jour Chikou à son compagnon. Tu es toujours décidé à venir avec moi ?

    - Oui, on va aller voir tes amis. Je suis devenu curieux et en plus, ici, on commence à s’empater. Ce n’est pas bon ça répondit Marx en étirant longuement ses muscles. Attendons la nuit et partons…

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    Fin de la deuxième partie

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