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    lecture-Cheminée
     
     

    Vieillir.

     

    « Il tourna la tête de l'autre côté et vit que les volets roulants, obéissant à un ordre mystérieux, descendaient lentement, fermant le passage à la lumière. »

     

    Fin." Sept étages" - Dino Buzzati

     

    Le vieil homme posa le livre sur la table basse et s’adossa lourdement contre le dossier élimé du canapé.

     

    Une bien triste histoire....

     

    « Sept étages »… Les sept étages de la vie.

     

    « Vieillir ! »…

     

    C’est le papier peint du séjour qui  jaunit, c’est la patine de la table en chêne de la cuisine qui se craquèle en prenant une douce teinte cuivrée, ce sont les jours qui raccourcissent, de trois minutes par jour.

     

    On sent bien, à la fin de l’été, que l’obscurité grignote du terrain sur la lumière.

     

    « Est ce que ça sent le vieux par ici ? » se demanda t-il brusquement. Comment pourrais je le savoir puisqu’il ne vient jamais personne et que je suis trop habitué à mon univers clos. »

     

    « Quelle magnifique écriture » pensa t-il, en fixant sans la voir, la couverture du livre de nouvelles qu’il venait de terminer.

     

    Entré dans cet hôpital pour un examen de santé de routine, le héros, Guiseppe Corte, n’en était plus ressorti. Un peu comme on entre dans la vie , par hasard, et qu’on n’en ressort que les pieds devant.

     

    A chaque tentative de rébellion, chaque fois qu’il avait manifesté son refus de l’inéluctable descente, les médecins l’avaient convaincu qu’il serait mieux soigné à l’étage inférieur. Parce que les praticiens étaient plus compétents, parce que le matériel serait plus performant.

     

    Et le vieil homme, de plus en plus las, parce qu’il ne savait pas, parce qu’il ne pouvait que faire confiance à ces hommes qui prenaient soin de lui, ces médecins si patients, si persuasifs, s’était laissé convaincre de descendre encore une fois d’un étage.

     

    On peut réagir à la contrainte, mais comment se rebeller quand on vous dit si gentiment que c’est…pour votre bien.

     

    Et ainsi d’étage en étage jusqu’au sous sol, jusqu’au dernier palier de la vie. Là où on n’aperçoit plus la cime des arbres et que, tournant la tête de l'autre côté, on s’aperçoit que les volets roulants, obéissant à un ordre mystérieux, descendent lentement, fermant le passage à la lumière. »

     

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