• La frontière

     

    La frontière

     

    J’ai rencontré en bordure du bois, un tigre aux larges cicatrices, à la gueule marquée et dure, un de ces tigres solitaires qui errent exclus, sans territoire bien défini, et qui doivent empiéter sans cesse sur le territoire des autres, moyennant paiement comptant.

    Je le regardais passer de loin, chaque matin plus marqué, mais les yeux toujours vifs.

    -  Je te vois rôder ici très souvent,  me dit il en s’approchant à distance respectable. Pourquoi ce regard triste et désabusé?  Tu hésites à pénétrer plus avant dans ces bois. La jungle te fait peur?

    Sans doute as tu raison d’avoir peur. Le monde auquel j’appartiens est impitoyable. Les coups pleuvent, la lutte pour la vie est ininterrompue, le cauchemar quasi permanent.

    Les illusions, ici, se perdent vite. J’ai vu beaucoup de téméraires y perdre aussi la vie ou repartir la queue basse, sans demander leur reste.

    Toi, tu es là mais tu hésites…Tu attends quoi au juste ?... Que viens tu faire ici? ”


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    - Je ne sais pas vraiment grand tigre, répondis-je.

    Il me semble que je suis attiré par cet endroit. Si mon regard te paraît triste, c’est peut être que mes yeux sont fatigués... Je n’ai plus guère de curiosité, je ne sais plus vraiment quoi faire, où diriger mes pas.

    L’air que je respire dans ces prairies vertes et humides sent le chloroforme et les médicaments.  J’en suis tout imprégné.

    Ta jungle est pleine de bruit et de fureur dis tu? Mais chez moi, où tout semble propre, bien agencé et en ordre, je sens comme une odeur de décomposition latente qui chaque jour, m’oppresse davantage.

    Pas de griffes qui coupent ou blessent franchement mais sans cesse des coups fourrés,  feutrés, camouflés, empoisonnés.

    Chez moi, on ne déchire pas la chair mais l’esprit.

    Chez moi, rien ne tranche mais tout ronge.

    Ce qui m’empêche d’aller plus avant dans ta jungle, c’est que je sais bien que d’un coup de patte, le premier coyote venu me jetterait à terre.

    Car si ma peau est lisse et blanche, ma chair est fatiguée. Malgré tes nombreuses cicatrices, je devine en ton corps un sang rouge et puissant.

    Ils ont marqué ta peau mais ils n’ont pas entamé ta force et ta vaillance.

    Notre rencontre ne peut avoir lieu qu’ici me semble t il, à la frontière de nos deux vies qui sont si dissemblables.

    Nos mondes sont impénétrables.

    Oui, mes pas me ramènent souvent ici, c’est vrai. Mais j’ignore pourquoi.

    J’attends, mais je ne sais pas quoi…

    Est ce normal ?

    Est ce important?

    Le tigre m’a regardé longuement sans rien dire. Puis il s’est éloigné et je ne l’ai plus jamais revu.


    Sans doute, une fois de plus, n’était ce qu’un rêve….


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    Mort d'un poisson rouge »

  • Commentaires

    1
    visiteur_magyc
    Mercredi 2 Janvier 2008 à 18:06
    donc je reviens pour te faire un kikou chaleureux... je t'embrasse !
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