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Ils courent mais après quoi ?
Ils courent mais après quoi ?
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Ils couraient, dans tous les sens Partout, je voyais des gens courir. Droit devant eux, ou bien en rond, à reculons, en travers, ou à quatre pattes Certains boitaient, dautres rampaient. Personne ne tenait plus en place. Toute cette agitation devenait inquiétante. Je regardais fasciné et inquiet.
<o:p></o:p>Les plus nombreux fonçaient en ligne droite, sans se poser de questions, la tête haute et le souffle court. Jai bien tenté de savoir pourquoi mais je ne suis pas parvenu à les rattraper.
<o:p></o:p>Celui qui tournait en rond et qui repassait régulièrement devant moi, jetait des regards angoissés à droite et à gauche, cherchant visiblement quelque chose quil redoutait Je larrêtais.
<o:p></o:p>- Vous nêtes pas fatigué de tourner en rond. On narrive nulle part cela, non ?
<o:p></o:p>- Je sais bien, dit il, le visage angoissé. Mais jhésite. Je ne men sors pas. Je ne sais quelle direction prendre. Avez-vous une idée ?
<o:p></o:p>Il y a quelques temps, javais tenté de donner une réponse à lun de ses semblables, javais suggéré une direction possible, mais il était revenu, vite fait, me reprochant vertement de lavoir induit en erreur. Je mabstins donc de répondre.
<o:p></o:p>Déçu, il est reparti, toujours inquiet, considérant que je navais rien à lui apporter.
<o:p></o:p>Celui qui avançait à reculons mexpliqua ensuite quainsi, paradoxalement, il avançait plus vite.
<o:p></o:p>Etonné, je lui demandais pourquoi.
- Quand je regarde devant moi, tout me fait peur. Jai limpression de passer mon temps à éviter des pièges, de contourner des obstacles. Tous les détours que je suis obligé de faire me ralentissent. De cette façon, le paysage que contemplent mes yeux nest plus dangereux puisquil se trouve derrière moi. Je ne ralentis pas sans cesse et je me régale en pensant à tout ce que jai évité...
<o:p> </o:p>Jen restais bouche bée. « Mais ou vont-ils chercher tout ça » pensais-je
<o:p></o:p>Et celui là, qui marche en travers, quelle est donc sa motivation ?
- En courant normalement, on rate beaucoup de choses, mannonça t-il. Alors quen faisant un pas à droite, puis un pas à gauche, on peut espérer navoir rien oublié. Il ny a quun seul inconvénient à mon système. Cest que la plupart du temps, il faut choisir son pas. Et cela me coûte. Terriblement. Souvent, les deux alternatives sont tentantes. Mais comme jai appris quon ne peut pas avoir en même temps le beurre et largent du beurre, alors je fais des choix. Mais ce ne sont pas souvent les meilleurs. Souvent, après, je regrette, mais cest ainsi. Il ne mest pas possible de faire autrement.
<o:p></o:p>« Pas bête lui, mais éternel insatisfait. » Bon, voyons plus loin
<o:p></o:p>- Et vous monsieur, pourquoi marchez vous à quatre pattes ?
- Parce que je suis convaincu que cest au niveau du sol, ou bien peut être sous terre, que se trouve ce que je cherche.
- Et puis-je savoir ce que vous cherchez ?
- Mais les traces, voyons ! Les traces !
- Heu !... Quelles traces ?
- Celles qui me donneront la voie à suivre, bien entendu. Jeune homme, nous ne sommes pas les premiers à arpenter notre bonne terre. Les anciens savaient. Jen suis convaincu. Alors je cherche ce quils nous ont laissé.
« Ma foi ! Pourquoi pas ? »
Je me dirigeais vers un groupe dhommes qui avançait péniblement, en boitillant. Certains plus que dautres. Mais ils tentaient tous de rester ensemble, à la poursuite dun peloton qui, inexorablement, gagnait du terrain.
- Que vous est il arrivé ? demandais je à lhomme de queue ?
<o:p></o:p>- Rien de spécial, répondit celui ci. Je suis fatigué, cest tout.
- Reposez vous donc un moment ! proposai-je
<o:p> </o:p>- Impossible !.. Je me ferai distancer.
<o:p> </o:p>- Vous savez, ils repasseront forcément. Où voulez vous quils aillent ?
<o:p> </o:p>- Quen savez vous ? Et sils ne repassaient pas ? Si je me retrouvais seul et perdu ?
<o:p> </o:p>- Nayez crainte. Depuis le temps que je les observe, je les ai tous vu repasser par ici, plusieurs fois.
<o:p> </o:p>- Vous me paraissez bien prétentieux, jeune homme ! On passe, on repasse mais il se peut quun jour, on ne repasse plus
<o:p> </o:p>- Oui quand on est mort
<o:p> </o:p>- En voilà des manières ! Vous magacez jeune homme ! Passez donc votre chemin !
<o:p></o:p>« Chaque fois que je dis ce que je pense, je me fais rembarrer Pourtant, bon dieu, je fais attention à ce que je dis ! Je donne simplement mon avis. Ce nest pas interdit tout de même. Je ninsulte personne Quils sont susceptibles tous ! Quel vent de folie plane donc en ces lieux ?»
<o:p></o:p>Enfin, un peu désespéré, je trouvais un peu plus loin un homme, assis sur un banc, penché en avant, les coudes sur les genoux et le menton dans ses mains. Il ne semblait ni perplexe, ni inquiet. Plein despoir, je massis prés de lui, pensant que jallais peut être enfin apprendre quelque chose de nouveau. Les gens assis, en cette période dagitation fébrile étaient rares et donc précieux.
Cependant, voilà, je ne savais pas quoi dire. Par où commencer. Et lhomme assis ne semblait pas décider à ouvrir la bouche non plus. Nous restâmes un long moment ainsi, à regarder devant nous les gens qui couraient, nosant pas, pour ma part, rompre un silence que, malgré mon insatiable curiosité, je respectais.
Il métait en effet difficile de demander : « Pourquoi êtes vous là, assis, sans rien faire ? Pourquoi ne courrez vous pas comme les autres, vous aussi ? » Difficile de demander à quelquun qui se conduit normalement pourquoi il agit ainsi
Comme sil ne mavait pas vu, lhomme se leva et partit. Je le regardais séloigner me disant
<o:p> </o:p>« Bah, peut être quil ne dit rien, parce quil nen pense pas plus Le silence nest pas toujours une forme de sagesse. En tout cas, je nen saurai rien. »
<o:p> </o:p>Je me levais à mon tour et poursuivis ma route, pas plus avancé .
Dur ! Dur ! de comprendre
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