• Emilie, la Pie Jolie….


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    Emilie, la pie Jolie….<o:p></o:p>

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    Il était une fois…

    <o:p></o:p>Dans une forêt de Provence, un monsieur qui se promenait avec un petit garçon.

    <o:p></o:p>Julien tenait la main de Claude, en marchant. Ce dernier racontait les mystères cachés dans les sous bois. Claude portait sur l’épaule un fusil de chasse avec lequel il ne tuait jamais rien. Devant eux gambadait un épagneul turbulent, frustré mais joyeux, ayant perdu depuis longtemps l’espoir de ramener à son maître, un quelconque gibier.

    <o:p></o:p>-         Pourquoi tu prends toujours ton fusil puisque tu ne t’en sers jamais ? avait demandé Julien

    <o:p> </o:p>-     Pour Bingo. C’est un chien de chasse, tu comprends. Alors quand il me voit le matin prendre mon fusil il est content. Il remue la queue et j’aime bien ce qu’il y a dans ses yeux à ce moment là.  En quelque sorte, je suis content, moi aussi, de le voir content. Même si je sais qu’il ne rapportera rien….

    <o:p></o:p>Cela avait fait beaucoup rire Julien. Mais il était content, lui aussi, que Claude ne tire pas sur les animaux. Il n’aurait pas aimé cela. Alors, satisfait de la réponse de son copain, il n’avait plus posé de questions.

    <o:p></o:p>Il courut en avant, rejoindre Bingo.  Il lança, le plus loin possible, un bâton devant lui. Le chien démarra comme une fusée en direction du point de chute.

    Brusquement, Claude dit :

    -         Chut !!!! Julien ! Viens prés de moi et ne bouge pas ! Viens vite ! Bingo, ici ! Au pied !

    Le chien obéit instantanément. Julien intrigué devant l’attitude de Claude se cacha derrière lui.

    <o:p></o:p>-         N’aie pas peur ! Je vais juste te montrer quelque chose. Mais ne fais pas de bruit ! Baisse toi et regarde !

    Julien s’accroupit et suivit du regard le doigt pointé de son copain vers la branche d’un chêne.

    <o:p></o:p>-         Qu’est ce que c’est ? demanda Julien à voix basse

    <o:p></o:p>-         Un nid de pie, murmura Claude. Et il y a des petits à l’intérieur. C’est la saison. Tu veux un bébé pie ? Il s’apprivoise très bien, tu sais… Elle ne te quittera plus quand tu l’auras nourrie. Quand j’étais gosse, mon père m’en rapportait de temps en temps en revenant de la chasse. Tu veux que j’aille te la chercher ?

    <o:p></o:p>-         Oh, oui ! Je voudrais bien. Mais que va dire la maman pie, quand elle verra que son bébé a disparu ?

    <o:p></o:p>-         Elle vient de quitter le nid. Je l’ai vu partir pendant que tu jouais avec Bingo. Ne bouge pas ! Prends Bingo par le collier et tiens le bien, qu’il ne me suive pas.

    <o:p></o:p>Claude posa son fusil par terre et entreprit d’escalader le chêne. Admiratif, Julien l’observait pendant qu’il grimpait, sans effort apparent. Parvenu à la branche sur laquelle reposait le nid, l’homme, délicatement, plongea sa grosse main à l’intérieur et, se saisissant d’un petit volatile effarouché et battant des ailes, il redescendit précautionneusement de l’arbre.

    Le bébé restait blotti dans la main de Claude, pendant que Julien l’observait attendri et émerveillé. Du doigt, son compagnon caressait le duvet de l’oiseau en souriant. Celui-ci,  ouvrait et refermait son bec, demandant sans doute, à sa façon, qu’on le nourrisse.

    Bingo approcha son museau pour sentir, mais son maître d’une petite tape sur le museau l’obligea à reculer.

    <o:p></o:p>-         Avec quoi le nourrit on ? demanda Julien

    -    Je vais te montrer. Viens, on va rentrer, maintenant. Nous allons lui fabriquer un abri et lui donner quelque chose à manger. Des petites pies, tu sais, j’en ai élevé beaucoup quand j’avais ton âge.

    Dans son garage, Claude déposa le bébé oiseau sur un morceau de couverture en laine. Fouinant dans son fourbi, il sortit ensuite un paquet de graines de blé tendre et un biberon de poupée. Glouton, l’oiseau avala les graines sans s’arrêter. On aurait dit qu’il crevait de faim. Puis le biberon dans une main  et maintenant de l’autre le bec ouvert de la pie, il déposa quelques gouttes d’eau dans son gosier.

    -         Voila, cela suffit pour ce soir. De temps en temps, quand il grandira, tu pourras aussi lui donner quelques petits vers à manger. Les oiseaux adorent ça, tu sais. Tu peux aussi lui donner des miettes de pain. On va fabriquer maintenant un petit abri que tu amèneras chez toi avec les graines et le biberon. Il faut que ce soit toi qui lui donnes à manger et à boire car l’oiseau  nouveau né s’attache obligatoirement à celui qui prend soin de lui.

    <o:p></o:p>Claude, bricoleur assermenté par des années de vie à la campagne, eut tôt fait de construire une petite cage sur pilotis, couverte d’un bout de tôle ondulée et muni d’un plancher en bois, sur lequel il installa l’oiseau emmitouflé dans son bout de couverture. Puis il le donna à Julien avec les fournitures.

    <o:p></o:p>-         Où vas-tu la mettre ? demanda t-il à l’enfant

    -         Dans ma chambre, à côte de mon lit, répondit Julien

    <o:p></o:p>Claude sourit, s’attendant par l’avance, à la réponse de son petit copain.

    <o:p></o:p>-         Ta maman sera d’accord ?

    <o:p></o:p>-         Oui, bien sûr… A demain Claude ! Et merci !

    En courant, Julien regagna sa maison, qui jouxtait celle de Claude. Ils habitaient  à l’écart d’un village, au lieu dit « Puits Léonie ». Composée d’une dizaine de maisons, abritant pour la plupart d’anciens mineurs à la retraite, le hameau formait une oasis de tranquillité baigné la plupart de l’année par le soleil provençal.

    -         Regarde ce que Claude m’a donné maman !

    <o:p></o:p>-         Qu’est ce que tu me ramènes encore ? demanda cette dernière souriante en voyant la mine épanouie de son gamin.

    Elle avait l’habitude des retours de promenade enthousiastes de son gamin. Quand ce n’était pas des asperges sauvages, c’était du pissenlit pour la salade, ou des herbes aux multiples pouvoirs magiques sélectionnées par son copain Claude avec qui il passait la plupart de son temps.

    Julien s’occupa de son volatile avec l’amour que l’on devine.

    Emilie, il l’avait baptisée Emilie….

    Emilie qui, bientôt, quitta sa cage et voleta un peu partout dans la maison. Maman n’appréciait pas trop, mais elle passait beaucoup trop de choses à son fils, s’avouait elle, depuis qu’elle s’était retrouvée seule à vivre avec lui, après la mort de son mari, prématurément disparu.

    Mais Julien était si gentil, si adorable. Comment refuser à un enfant joueur et plein de joie de vivre, ce qu’elle n’avait pas eu étant petite. Et puis son fils n’abusait pas. Quand elle disait non, il n’insistait pas. C’est vrai qu’il était rare qu’elle lui refuse quelque chose, puisque les devoirs étaient faits dans les temps et sans rechigner et que ses promenades avec Claude dans la campagne et dans les bois environnants ne présentaient aucun danger.

    Au contraire. Il s’épanouissait chaque jour davantage. Brave garçon, Claude, célibataire et un peu ronchon parfois, adorait Julien qui le lui rendait bien.

    Le matin, en se levant, Julien ouvrait la cage d’Emilie qu’il avait refaite plusieurs fois pour l’adapter à sa taille. La pie venait alors se poser sur sa tête les yeux écarquillés. Julien, en pyjama, et pressé, jouait alors un moment avec elle, dans le jardin, avant de prendre son petit déjeuner.

    Des petits objets brillants disparaissaient, bien sûr, de temps en temps, mais ce n’étaient que des babioles et Julien, ayant découvert l’endroit où sa pie les déposait il les récupérait et  les remettaient entiers à leur place, la plupart du temps…

    -         Tu sais Julien !... Ta pie vole bien maintenant. Si tu veux la garder prés de toi, il faudrait lui couper les ailes!

    <o:p></o:p>-         Quoi ? s’indigna Julien scandalisé.

    Il ne pouvait pas penser sérieusement que son ami ait pu dire une chose pareille…

    <o:p></o:p>-         Mais non, Julien. Il ne s’agit pas de faire du mal, à Emilie. Juste de raccourcir un peu les longues plumes qui lui permettent de voler. C’est indolore. Elle ne s’en apercevra même pas. Si tu ne le fais pas, elle risque, un jour de s’envoler et de ne plus revenir !

    <o:p></o:p>-         Tant pis ! dit Julien. Elle partira ! Mais, même si elle ne souffre pas, moi je saurais que je l’ai fait et je ne veux pas !

    -         Comme tu veux, fiston. Comme tu veux…. C’est ton oiseau…

    <o:p></o:p>Malheureusement, à quelques temps de là, un terrible accident survint, un jour dont Julien se souviendrait toute sa vie.

    Le chien de la mémé, de l’autre côté de la rue s’étant échappé  pénétra dans le jardin et blessa, d’un méchant coup de dents, la jeune pie qui, inconsciente du danger, ne s’était pas envolée..

    Julien accourut, mais trop tard ! Le chien, apeuré par les cris stridents de l’enfant, repartit à bride abattue, laissant Emilie couchée sur le flanc, vivante mais immobile, tétanisée. Julien la replaça dans son abri et courut prévenir Claude qui bricolait tranquillement devant sa maison.

    <o:p></o:p>-         Claude ! Vite ! il faut aller chez le vétérinaire ! Emilie vient d’être mordue par le chien de la mémé !

    <o:p></o:p>Laissant son ouvrage en plan, le brave homme suivit Julien et regarda la pie. Il dit simplement :

    <o:p> </o:p>-    Viens on y va ! Je sors la voiture ! Prends Emilie !

    Sur le chemin du retour Julien demanda :

    <o:p></o:p>-         Qu’est ce qu’il a dit le vétérinaire ?…

    <o:p></o:p>Il n’avait pas voulu entrer. Il s’était assis, dans la salle d’attente, penché en avant, les yeux vides fixant le sol. Le vétérinaire, après avoir examiné l’oiseau, n’avait rien dit. Ce n’était pas nécessaire. Il avait regardé Claude qui savait déjà.

    <o:p> </o:p>-    Il lui a passé une pommade, sur la plaie. Mais elle est bien touchée tu sais….

    <o:p></o:p>Julien détourna les yeux du visage de son compagnon qui reflétait, en miroir, toute la tristesse de l’enfant.

    <o:p></o:p>Quelques jours après, Claude vint chercher Julien.

    <o:p> </o:p>-    Il y a eu un lâcher de faisans, aujourd’hui. Viens avec moi. On va voir si on peut en dénicher quelques uns. Bingo est impatient de courir. Allez viens ! Secoue toi !

    -         Tu as vu la tombe d’Emilie ?

    <o:p></o:p>-         Non, montre moi !

    <o:p></o:p>Au fond du jardin, sur un monticule de terre, un petit panneau en bois se découpait au milieu de la verdure. Sur ce panneau, on pouvait lire, écrit au stylo feutre d’une main malhabile :

    <o:p></o:p>

    « Çi gît Emilie,

    La pie jolie,

    Du Puits Léonie »

    <o:p> </o:p>

    -         Tu es un poète, Julien ! J’y connais rien en poésie, mais je sais que tu en es un !

    Et, tapotant doucement la tête de l’enfant, ils prirent ensemble le chemin de la forêt.

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  • Commentaires

    1
    visiteur_starletteoh
    Lundi 20 Octobre 2008 à 21:38
    comme toujours, c'est une histoire émouvante mais l'homme est toujours avide de dominer le monde.....si la petite pie était restée dans le nid , elle aurait conservé son aspect sauvage et le monde des humains ne l'aurait pas "avalée"...........
    Michaux écrivait "plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien"......Cela est assez parlant je pense ..........
    2
    visiteur_Natacha
    Samedi 15 Novembre 2008 à 16:56
    Concentré d'émotions à l'état pur. Elle est belle ton histoire de petit enfant, Julien. Je me plait à l'imaginer vécu, avec la joie et dans la peine. Bisous. Natacha
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