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    Le vieil homme<o:p></o:p>

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    En rentrant chez moi, à la nuit tombée, j'ai croisé un vieil homme, assis sur un banc, devant ma porte.

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    Les deux mains sur le pommeau de sa canne, le menton posé sur ses mains, il fixait sans le voir, un point imaginaire, devant lui.

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    Les rides, sur son visage, dessinaient de fines lignes verticales et horizontales partant de ses paupières mi clauses, se croisant par endroits comme les méandres d'un cours d'eau, et se perdant enfin dans les plis d'une écharpe grise et terne, serrée autour de son cou.

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    Une tristesse indéfinissable et lointaine se devinait dans son regard voilé.

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    Comme aimanté par ce visage désertique et pourtant, si expressif, je m'assis prés de lui.

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    Parfaitement immobile, il ne prêta aucune attention à moi.

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    Nous restâmes ainsi plusieurs minutes, lui perdu dans ses pensées, et moi, toujours  ressassant les miennes.

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    La vision de cet homme sans âge fit remonter dans mon esprit, au milieu du chaos des pénibles péripéties de ma journée de travail, la même sensation que j'éprouve, chaque fois que je me pose, pour regarder mes chats.

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    La même beauté intérieure troublante et irréelle. La même sensation d'éternité.

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    Les mêmes interrogations, aussi...

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    A quoi bon gesticuler sans cesse ? Se défendre, se battre, partir pour revenir, se mettre en colère, résister ?

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    Pourquoi autant de haine, de jalousie, de combats stériles et cruels ?

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    Pourquoi ne pas s'asseoir, côte à côte, regarder devant soi, se tenant par la main ?

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    Laisser venir, en paix, images et émotions...

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    Pourquoi rechercher, encore et toujours, ce que nous ne pouvons atteindre ?

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    Pourquoi enfin, cette impression récurrente de n'être jamais à la bonne place ?

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    De vouloir s'éloigner ?

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    Partir... un peu plus loin ?

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    Nous regardions tous les deux devant nous, étrangers l’un à l’autre et pourtant, en ce qui me concerne, infiniment proches.

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    Je ne lisais pas dans les rides de mon voisin la fatigue ou la résignation, mais une forme de pureté retrouvée, acquise durement sans doute, quasiment surnaturelle.

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    Ces lignes tourmentées évoquaient je ne sais quels voyages, les méandres et les contours d'un vécu que je voulais, sans bien savoir pourquoi, peu ordinaire.

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    Il n'avait pas bougé d'un pouce lorsque je me suis assis.

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    Je n'osais pas parler de peur de rompre le charme.

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    Je sentais confusément qu'il n'y avait rien à dire, qu'un seul mot prononcé aurait le même effet qu'un souffle sur l'akène de la fleur d'un pissenlit.

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    Nous sommes donc restés silencieux, tous les deux, une dizaine de minutes.

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    L'homme enfin, s'est levé doucement, en s'appuyant sur sa canne.

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    Il a fait quelques pas hésitants, puis il s'est retourné.

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    Il m'a regardé longuement, sans qu'aucun des traits de son visage ne bouge, et il s'est éloigné.

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    Je l'ai suivi des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse.

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    Je suis encore resté une dizaine de minutes, assis, seul, sur le banc.

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    Peut être que cette sensation passagère n'avait été que le reflet de mes pensées moroses ?

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    Peut être avais je cru découvrir, chez cet homme voûté, l'image de mon devenir ?

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    Ou bien n'était ce qu'illusion, provoquée par les jeux d'ombre du crépuscule, transformant une simple silhouette en mystérieux mirage ?

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    Peu importait au fond.

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    L'essentiel, c'était ce que j'avais ressenti.

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    Une fois de plus.

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